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T. Ehrengardt (DREAD Editions)

I'm a reggae rocker... do you love me?

C’est un fantasme rockers que cet extraordinaire morceau produit par Dillinger au début des années 80 (Oak Sound). Sur un recut terrible du Drumsong riddim (Studio One), il lève une « armée de 5 hommes » pour s’exprimer en toute liberté sur cet interminable dub. Plus de 15 minutes de pur bonheur. Avec les chœurs à la Burning Spear (trrrrruuulut-tut), une basse éternelle et la tchatche irrésistible de Dillinger, on plonge au cœur de l’Ancien Testament, croulant sous les « Jah rastafari », « have mercy », « no mercy for the merciless »... Ne cherchez pas de refrain, ce titre n’a rien d’universitaire. Il avance dans les ténèbres sans se soucier de direction – ne sont-elles pas partout alentour de toute façon, dans cette vallée tropicale de l’ombre de la mort ?

Al Campbell appelle les gens à « faire le bien » s’ils « veulent vivre bien » tandis que Wayne Wade nous invite a quitter Babylone au rythme du rockers pour passer les portes de Sion au son d’un break hallucinant, troublant—qui débouche sur deux coups de basse assommant. Groggy, vous voilà balancés de droite à gauche par Dillinger qui raconte l’histoire de Jonas, et de cette « great stone » biblique... « Jah! » Nous voici tout embrumés de reggae, noyés sous la chaleur maternelle de cette musique terrible et terrifiante, peuplée de « wicked », d’anathèmes et de vipères. Au fond pourtant, résonne un saxophone qui contient toute la mélancolie d’un peuple qui fut un jour esclave. Le riddim se lance ensuite, seul et « without any apology », encore paré de quelques lambeaux de voix qu’il porte en triomphe, sans conscience ; il avance... drum and bass. Drumsong and bass. « Oooooh, hey-o hey-o-o-o-o-o... » lance une voix fantomatique perdue dans un echo sans fond de douce noirceur.

Sur une sono digne de ce nom, ce titre sans commencement ni fin, résonne comme l’alpha et l’oméga du reggae rockers, celui qui explosa dans toutes sa splendeur au milieu des années 70, et qui hurla au monde, avec joie et fureur, toute sa beauté décomplexée. Dread... inna Babylon.

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